41 notes dans la catégorie "Theatre"

[vu] la robe de mariée, texte de katherine battaiellie

Hier soir j'ai vu ce spectacle émouvant et beau au théâtre Essaïon. Il reste encore quelques dates (le mercredi et le jeudi jusqu'au 6 juin, sauf les 29 et 30 mai).

LarobedemarieeSur scène Marie-Catherine Conti incarne Marguerite, internée pour troubles schizophréniques.
C'est elle aussi qui a transposé pour la scène le beau monologue écrit sans ponctuation ni indications scéniques de Katherine Bataiellie.
Les murs imposants de la belle cave-théâtre du Marais (rue Pierre au Lard) suggèrent immédiatement l'enfermement, la réclusion, l'isolement. Puissance d'un décor naturel et sobre, belle musique d'accompagnement au violoncelle de Lucie Lacour.
Aucune hystérie dans le jeu de la comédienne, mesuré et tenu, poignant. La performance de Marie-Catherine Conti tient dans les basculements d'humeur et de personnalité de Marguerite, entre exaltation, malice, sauvagerie, calme, fébrilité, douceur enfantine, colère, moquerie, espérance.

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[carnet] jaseries automnales (septembre - octobre 2020)

où il sera question de sorties empêchées, de chambres à garder, de cages, et de quelques livres pour s'évader

Hotel Apollinaire, 39 rue Delambre 7514 Paris“ Ma chambre a la forme d'une cage ”
(à fredonner avec le petit accent swing de China Forbes !)

Depuis hier, grâce à Joseph Ponthus-Le Gurun(1) sur facebook, je sais d'où viennent la plupart des mots étranges du refrain de la chanson de Pink Martini (Je ne veux pas travailler, album Sympathique, 1997).
En 2017, j'avais zappé l'excellent articlelien de Gérard H. Goutierre pour Les Soirées de Paris, le blog  : “ Apollinaire ne veut pas travailler, il veut fumer . Tout y est pourtant bien expliqué et illustré !

Pour les réfractaires aux liens click and read, je recopie d'abord le poème(2) Hôtel de Guillaume Apollinaire, puis les paroles du refrain des musiciens de Portland, OR :

Ma chambre a la forme d’une cage / Le soleil passe son bras par la fenêtre / Mais moi qui veux fumer pour faire des mirages / J’allume au feu du jour ma cigarette / Je ne veux pas travailler — je veux fumer / Apollinaire, 1913

Ma chambre a la forme d’une cage / Le soleil passe son bras par la fenêtre / Les chasseurs à ma porte / Comme les p’tits soldats / Qui veulent me prendre / Je ne veux pas travailler / Je ne veux pas déjeuner / Je veux seulement l’oublier / Et puis je fume / Pink Martini, 1997

La surprise (pour moi) est jolie et valait bien une petite jaserie (pour vous).
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1. Joseph Ponthus-Le Gurun a par ailleurs laissé entendre récemment que Henri Calet ne serait pas absent de son prochain livre, suspens... JPLG est l'auteur très remarqué de À la ligne (note de lecture du 9 janvier 2019), grand connaisseur d'Apo.
2. Hôtel  été mis en musique par Francis Poulenc avec quatre autres poèmes d'Apollinaire (Banalités, cinq mélodies pour voix et piano, 1940).

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[jaseries] paris est tout petit pour ceux qui... aiment le spectacle vivant

à propos des récitals Ici-bas à la Seine Musicale, et Affreuses, Divines, et Méchantes à l'Opéra Comique

En ce début d'année, je me suis gavée de sons, de voix et de lumières, en égoïste.
Mes choix me paraissaient un peu trop marginaux et excentriques pour entraîner d'innocents cobayes dans mes aventures. Ou alors un peu lâche, je préférais assumer seule la déception toujours possible !
Je sais bien l'inutilité de ce billet puisque les événements sont passés et que certains ne sont plus à l'affiche, mais je voulais garder une trace des émotions inattendues qu'ils m'ont laissées.

Porte 8, Opéra Comique, cabaret, photo d'Emeline Bayart (facebook)J'avais commencé par Emeline Bayart à l'Opéra Comique.
Mais pas salle Favart. Il y a une jolie programmation annexe intitulée Porte 8, dans une salle transformée pour l'occasion en caf'conc de luxe : petites tables juponnées de rouge, bougie (led, pour la sécurité...), et une bouteille de bon champagne !
Accompagnée au piano par Manuel Peskine, la comédienne et chanteuse compose un récital coquin et vachard : des textes sans âge, d'une écriture riche et virtuose bourrée de doubles sens vertigineux, des mélodies lyriquement acrobatiques comme on en connaissait au tournant du XXè siècle, avec Polaire et Yvette Guilbert, et que plus tard, Patachou, Colette Renard, Jacqueline Mailhan et d'autres, ont perpétué, mais qu'on a peu à peu complètement perdus.
L'interprétation d'Emeline Bayard est incroyable, comme comédienne et comme chanteuse...
Je savais qui elle était (ce n'était visiblement pas le cas pour beaucoup de spectateurs énormément surpris et ravis) ; je l'avais vue au théâtre dans Fric-Frac et deux comédies de Tchékov. Elle a aussi incarné le rôle titre au cinéma dans Bécassine ! de Bruno Podalysdès. Je ne la connaissais pas en diva. C'est un phénomène... Il faut la voir, lascive, ranimer un Boieldieu de marbre par un baiser voluptueux...
Il y a des dates en mars, ne la manquez pas ! Si j'avais pu (mais non hélas), j'y serai retournée pour partager ce moment délicieux... et la bouteille de champagne avec vous !

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[esprit de noël] les couleurs de l'hiver, collectif

avec Thomas B. Reverdy (écrivain), Florence Cosnefroy (plasticienne) et des personnes détenues de la Maison d’arrêt des Hauts-de-Seine ; en collaboration avec le Service Pénitentiaire d’insertion et de probation 92

in catalogue Maison de la Poésie : S’appuyant sur le travail des deux artistes, cet atelier a consisté à mettre en relation les « couleurs de l’hiver », choisies par chaque participant, avec un texte évoquant une personne, un lieu ou un souvenir qui lui était associé. Puis ces textes sont devenus des lettres, et tous ces morceaux de souvenirs, ces lieux, ces personnes, sont devenus autant de fragments d’histoires destinées à être lues et adressées à quelqu’un. Ils sont les récits d’un hiver qui se souvient des temps meilleurs et se les récite comme pour se réchauffer. Ensemble ils composent une mosaïque d’images et de sentiments, de courts récits, de poèmes, de nostalgies et de désirs lancés vers nous comme un pont. Il sont notre humanité et nos rêves blottis au cœur de l’hiver.C'était hier soir, à la Maison de la Poésie (rue Saint-Martin, proche Beaubourg) — transformée pour l'occasion en Maison de l’Émotion...
La veille Thomas B. Reverdy avait lancé sur ZeSocialNetwork, un appel pressant à venir écouter la restitution d'un atelier d'écriture bien particulier :
“ comme c’est les détenus qui vont lire, et que c’est quelque chose de très très peu naturel, de monter sur une scène, et qu’ils ont obtenu une permission de sortie, et qu’ils vont venir de Nanterre, j’ai vraiment envie qu’il y ait un peu de public dans la salle. ”

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[carnet] mes jaseries de février

jaserie : subst. fém. [ʒɑzʀi], [-a-] ; synon. de babillage. La jaserie avant le langage est la fleur Qui précède le fruit (Hugo, Légende, t. 4, 1877, p. 857)

vacances en Bretagne, fin des années 50, mes parents ont autour de 35 ans (l'âge de mes enfants aujourd'hui) — Suzel (3 octobre 1921 - 11 mai 2007), Charles (24 août 1920 - 5 février 2019)Orpheline : il faudrait un autre mot pour signifier la perte du dernier survivant de ses parents lorsqu'on est soi-même bien avancée en âge.

L'écrivain et psychanalyste belge Lydia Flem écrit1 :

“ A tout âge, on se découvre orphelin de père et de mère. Passée l'enfance, cette double perte ne nous est pas moins épargnée. Si elle ne s'est déjà produite, elle se tient devant nous. Nous la savions inévitable mais, comme notre propre mort, elle paraissait lointaine et, en réalité inimaginable. Longtemps occultée de notre conscience par le flot de la vie, le refus de savoir, le désir de les croire immortels, pour toujours à nos côtés, la mort de nos parents, même annoncée par la maladie ou la sénilité, surgit toujours à l'improviste, nous laisse cois. ”

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1. in: Comment j'ai vidé la maison de mes parents (Seuil 2004, Points 2013)

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[2/3] si internet nous était (aussi) (bien) conté

volet 2 — comment défendre nos libertés en ligne ? La Quadrature du Net
exposé-performance de Jérémie Zimmermann,  au Théâtre du Rond-Point, le samedi 1er février 2014

illustration sur le site du Théâtre du Rond-Point, février 2014
(c) DR

Tiens ça tombe pile, c'est aujourd'hui 11 février 2014, la journée de protestation contre la surveillance de masse lien (et d'hommage à Aaron Swartz)lien

Pour les gens comme Jérémie Zimmermann (pas de parenté que je sache avec Hubert), c'est tous les jours et depuis toujours le jour des libertés numériques. Lui est tombé très jeune dans la potion du barde Richard Stallman,lien le pape du logiciel libre, même si il moque gentiment le look de gourou autiste de son grand aîné. L'autre jour, au Rond-Point il rendait surtout un vibrant hommage à Edward Snowden qui a offert sa liberté (sa vie, disait-il) pour que nous puissions comprendre la menace de l'informatique "nuisible" et espérer retrouver confiance dans des technologies non toxiques qui permettent le partage des connaissances et de la culture.

Pour @jerezim, le malheur est venu — dit-il — de la perte d'autonomie de l'individu vis-à-vis des technologies de l'information. Le contrôle à été peu à peu perdu sous couvert de simplicité offerte à l'utilisateur, de convivialité  : le fameux mais fallacieux user-friendly et sa commère interactivité. Le reste à suivi, rendant possible la surveillance de masse, la perte de la liberté de se faire une opinion anonymement par la simple consultation de données publiques (ou qui devraient l'être).

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[étude, bnf] pierre desproges, moments de réflexion autour d'un iconoclaste

couverture du DVD : "Desproges est vivant" d'Yves Riou et Philippe PouchainEn titre de ce billet, l'intitulé académique officiel de l'après-midi du mercredi 6 novembre que j'ai passée dans le petit auditorium de la grande bibliothèque François-Mitterrand.

Ci-dessous des sous-titres possibles qui me sont venus à l'écoute attentive et ravie des intervenants, spécialistes et/ou amis du récipiendaire par contumace :

voilà 25 ans qu'on n'entend plus desproges : un silence qui en dit long, non ?

desproges, dérangeur public n°1 ?

un colloque pd à la bnf, étonnant, non ?

desproges, le rire d'une autre époque ? l'époque d'un autre rire ?

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[vu, lu] lettre à ma mère, de georges simenon

Avant que j'oublie de vous le dire : courez-voir Robert Benoit interpréter lui-même son adaptation pour la scène du texte de Simenon.lien
C'est au Théâtre du Lucernaire jusqu'au 5 mai.lien  C'est à 18 heures 30, ça dure 1 heure 15 environ. C'est un peu tôt pour ceux qui travaillent, mais idéal pour un vendredi de RTT !

dispositif scénique de Lettre à ma mère, (c) Pic'Art ThéâtreLe billet de Pierre Assoulinelien m'avait donné envie de voir le spectacle.

L'autre soir, le noir fait sur scène à la fin du long monologue n'a pas suffi au comédien pour revenir à lui.
Spectatrice médusée, impressionnée, je l'ai vu l'acteur tituber, frissonner, le visage fermé, pour son premier salut.
Il a fallu nos applaudissements soutenus pour le ranimer, le redresser, éclairer son sourire. C'est dire l'intensité de la performance...

J'ai voulu savoir ce que Robert Benoit avait laissé de côté, pas repris dans le texte original de Lettre à ma mère. Très peu de choses en fin de compte. Mais cette phrase, je crois qu'elle n'y était pas :

“ Mes propres enfants s'interrogeront-ils un jour sur moi comme je m'interroge sur toi ? J'en doute. Et de toute façon je n'en saurai rien. ”

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