[jaserie littéraire] mon challenge interallié

où il sera question de : Que reviennent ceux qui sont loin de Pierre Adrian, La petite menteuse de Pascale Robert-Diard, Roman fleuve de Philibert Humm, Le mage du Kremlin de Guiliano da Empoli, La vie la plus douce de Fabrice Gaignault, et aussi de Le colonel ne dort pas d'Emilienne Malfatto

photo volée à Livres HebdoPas vraiment un challenge puisque j'en suis l'unique challengeuse... sauf si vous avez le temps de lire cinq excellents romans de la rentrée littéraire d'ici au 8 novembre. À vos lunettes !
À cette heure-ci (samedi 29 octobre, circa 18:00) il ne m'en reste qu'un seul à lire, je devrais donc pouvoir très vite conforter et annoncer mon choix personnel pour le prix Interallié 2022 qui sera proclamé le mercredi 9 novembre chez Lasserre.

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[jaserie caniculaire] aux affligés, brasserie parisienne

Métro Glacière, Antoine Meurant, illustrateur 06 82 17 47 21
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Cherchez pas : j'ai changé le nom de la brasserie Aux Affligés qui sert de décor et de titre à mon billet. Mais ce qui est véridique, c'est que c'est la terrasse la plus proche de l'entrée/sortie du cimetière [bipbip]. Je m'y suis affalée à midi après mon cours de gym, bien décidée à profiter du calme relatif : on entendait surtout les clings et les clangs du montage du marché du samedi. Il me semblait depuis le matin que tout le monde se déplaçait au ralenti, côté ombreux des trottoirs, et de préférence en direction d'une terrasse où s'asseoir et se rafraîchir.

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note : l'illustration n'a (presque) rien à voir... mais elle me plait beaucoup et est très réfrigérante ; et surtout elle est signée Antoine Meurant dont vous pouvez retrouver les irrésistibles dessins ici, et (il expose en ce moment au Select où je me suis laissée tenter par un autre de ses paysages parisiens malicieux)

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[compile] où l'on reparle de renata n'importe quoi et de catherine guérard

papier pour le sitelien Les Notes (Choisir & Lire) : présentation de la réédition de Renata n'importe quoi, roman de Catherine Guérard, aux éditions du Chemin de Fer, novembre 2021 ; c'est un mashup de plusieurs chroniques déjà publiées ici à propos de ce roman obsédant, avec quelques révélations "sensationnelles" - mais malgré tout incomplètes -, sur son auteure...
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les extraits de Renata n'importe quoi infra respectent bien évidemment la ponctuation inventée par Catherine Guérard


crédit photo : Tilly Richard, 2021Dans une des chroniques littéraires rassemblées dans Le Cycliste du lundi (recueil posthume, La Grande Ourse, 2012), François Nourissier écrivait :
« Puis vint l’automne 1967 et l’on découvrit un vrai roman de Catherine Guérard, composé il est vrai d’une seule phrase, mais une phrase longue de cent quatre-vingt-quinze pages. Cette phrase frôla le Goncourt, aventure qui prouve que nous pouvons tout attendre de cette romancière. […] Catherine Guérard a écrit un roman qui défie l’imitation et décourage la comparaison […] je ne sais pas ce qu’elle écrira ensuite, ni quand, ni même si elle n’attendra pas encore une dizaine d’années avant de se remettre au travail ; il n’en est pas moins sûr que nous avons affaire avec Catherine Guérard à un personnage exceptionnel ; Renata n’importe quoi suffirait à nous empêcher d’oublier son auteur. »

 

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[jaserie d'automne] hommages collatéraux

jaserie : note de blog de type fourre-tout où je raconte des trucs un peu personnels mais pas trop ; où je fais des petites recommandations timides pour des machins décalés si possible ; dans laquelle je vous invite à suivre des liens (ça c'est valable pour toutes mes notes, en fait)

Dans celle-ci il sera question de : betteraves, ossements, vitraux, crypte, armée de la Loire, Mac Mahon, commémoration, Ladon, parents (les miens), vivre à la campagne au Japon

Betteraves, route du LoiretHier 21 novembre 2021 en fin d'après-midi, sur le bord de la route de Pithiviers à Étampes, sous un ciel gris tabac, les énormes entassements de betteraves évoquaient pour moi un ossuaire... On ne s'est pas arrêtés pour faire la photo, mais ce matin j'en ai retrouvé une qui date de plusieurs années et qui rend bien l'impression ressentie.
— Mais pourquoi elle nous raconte ça ? pourquoi cette morbidité ? Ben parce que c'est de saison, et que c'est mon blog à moi.

Ladon, c'est le village du Loiret où mes parents ont vécu à partir de 1982, après Orsay, et où ils sont inhumés.

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[réédité, relu] renata n'importe quoi, roman de catherine guérard

aux éditions du Chemin de fer, novembre 2021, 178 pages, 18 euros

en 4è de couv : Catherine Guérard nous emporte dans le monologue de son héroïne, bonne à tout faire, qui décide un jour de quitter ses patrons pour devenir “une libre”. Ce sont trois jours et deux nuits d’errance, à marcher dans les rues, s’asseoir sur les bancs, regarder les passants et écouter les oiseaux. La narratrice va se confronter à un monde qu’elle semble découvrir au fur et à mesure qu’elle l’arpente, un monde qui la rejette systématiquement, elle dont la liberté ne peut souffrir aucune entrave. Le plus saisissant dans ce roman est la réussite magistrale d’un parti pris formel : une seule longue phrase ponctuée de quelques virgules et majuscules judicieuses. Le flot du texte emporte le lecteur dans les ressassements et les obsessions d’une pensée pleine de candeur mais toujours déterminée et dangereusement radicale. Publiée pour la première fois en 1967, cette œuvre résonne aujourd’hui comme un hymne prémonitoire. N’annonce-t-elle pas le vent révolutionnaire qui soufflera bientôt sur un monde corseté dans ses certitudes et empêtré dans sa peur de manquer ou de perdre ses acquis ? Renata n’importe quoi c’est l’invraisemblable odyssée d’une bonne de Giraudoux qui attendrait Godot. Un trésor qu’une communauté de lecteurs initiés se transmet comme une pépite, qui nourrit une réflexion profonde et nécessaire sur l’absurdité de nos sociétés, la loi, l’argent, le travail et la consommation. Ou pour le dire autrement : comment refuser l’aliénation qui nous est imposée sans apparaître soi-même comme un aliéné dans le regard des autres ?  "Alors leur vie ne leur appartient pas, ils obéissent au temps, et j’ai pensé Moi je suis mieux qu’eux ma vie m’appartient, je n’ai pas un patron qui possède ma vie, c’est horrible ça, j’ai pensé, d’avoir une vie qui n’est pas à soi, C’est des fous les gens, j’ai pensé, pour avoir de l’argent ils vendent leur vie à quelqu’un d’autre, comme si on vivait mille ans, comme si on vivait deux fois"Réédition tout à fait inattendue et très heureuse, d'un roman-culte, marquant et mystérieux ; c'est le second (dernier) roman d'une auteure incompréhensiblement disparue des radars de l'Édition, compte tenu de son talent et sa modernité.

Je l'ai lu une première fois en 2013 ; Alain Bonnand m'avait offert l'édition Gallimard (aujourd'hui épuisée), il avait deviné que cela allait me plaire. C'est lui encore qui vient de me signaler la réapparition de Renata n'importe quoi.

À l'époque j'avais voulu me renseigner sur l'auteure. Mais Catherine Guérard, c'est plutôt Catherine n'importe qui parce qu'avec ce nom très homonymé, on ne trouve pas grand-chose sur elle. Un Masque et la Plume de 67 à l'INA dans lequel elle intervient depuis la salle, mais aucune image. Est-ce que la Catherine Guérard qui regrettait le départ de bébé Adjani de la Comédie Française en 75, c'était elle ?  "Une Adjani, il n'y en a qu'une par siècle !". Si elle avait si complètement disparu des internets, c'était sans doute pour une triste raison ?

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[babelio, masse critique] le sergent salinger, roman de jerome charyn

aux éditions BakerStreet, traduit de l'américain par Isabelle D. Philippe, septembre 2021, 335 pages, 21 euros
lu pour l'opération Masse Critique de Babelio lien (on choisit un livre dans une liste de nouveautés, on reçoit le livre, on donne son avis sur le livre, on le partage)

Le portrait insolite de la légende littéraire américaine en jeune soldat à la fin de la guerre, au débarquement, à la libération de Paris...Quand j'étais snob et menteuse (il y a fort longtemps)... je disais que mon livre préféré, c'était L'Attrape-Cœurs de J. D. Salinger.
Depuis j'ai presque tout oublié de l'errance d'Holden Caulfield dans Manhattan.
Par contre j'ai conservé le souvenir du pincement au cœur que m'avaient laissé les dernières lignes d'Un jour rêvé pour le poisson-banane (dans le recueil intitulé Nouvelles).
Dans une interview récentelien, Jerome Charyn dit que L'Attrape-Cœurs n'est pas son titre préféré de Salinger, qu'il vient bien après les Nine Stories. Comme moi ! ai-je pensé (moins snob, peut-être, mais pas plus modeste !).

Le Sergent Salinger est un roman biographique qui couvre la période 1942 à 1947 de la longue vie de Salinger.

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[#rl21] au printemps des monstres, roman de philippe jaenada

éditions Mialet-Barrault, août 2021, 749 pages, 23 euros

4è de couv : Ce n'est pas de la tarte à résumer, cette histoire. Il faut procéder calmement. C'est une histoire vraie, comme on dit. Un garçon de onze ans est enlevé à Paris un soir du printemps 1964. Luc Taron. (Si vous préférez la découvir dans le livre, l'histoire, ne lisez pas la suite : stop !) On retrouve son corps le lendemain dans une forêt de banlieue. Il a été assassiné sans raison apprarente. Pendant plus d'un mois, un enragé inonde les médias et la police de lettres de revendication démentes, signées "L'Étrangleur" ; il adresse même aux parents de l'enfant, horrifiés, des mots ignobles, diaboliques, cruels. Il est enfin arrêté. C'est un jeune homme banal, un infirmier. il avoue le meurtre, il est incarcéré et mis à l'écart de la société pour le reste de sa vie. Fin de l'histoire. Mais bien sûr, si c'était aussi simple, je n'aurais pas passé quatre ans à écrire ce gros machin (je ne suis pas fou). Dans cette société naissante qui deviendra la nôtre, tout est trouble, tout est factice. Tout le monde truque, ment, triche. Sauf une femme, un point de lumière. Et ce qu'on savait se confirme : les pervers, les fous, les odieux,  les monstres ne sont pas souvent ceux qu'on désigne. — Philippe Jaenada est l'auteur d'une douzaine de romans,  dont Le Chameau sauvage (prix de Flore), La Petite Femelle, et La Serpe (prix Femina).“ Le plus difficile c'est de trouver par où commencer. ” (première partie, Le fou, p. 18)

Vendredi matin, il me restait une cinquantaine de pages d'Au printemps des monstres à lire (quand j'aime un gros livre et que j'approche de la fin, je ralentis pour faire durer le plaisir), et coïncidence (Philippe Jaenada les aime, et moi aussi) : au même moment à la radio, l'écrivain expliquait à Augustin Trapenard d'où lui était venue l'idée de s'intéresser au meurtre du petit Luc Taron le 27 mai 1964, à l'arrestation de Lucien Léger, sa condamnation à perpétuité (malgré le manque de témoignages, de preuves, de mobile), sa libération conditionnelle après quarante années en prison (Léger est sorti à soixante-huit ans à l‘automne 2005 ; il meurt en juillet 2008).

J'aurais bien eu envie de vous laisser là-dessus en vous envoyant écouter en podcast (lien) la belle voix nicotinée de l'écrivain, parce que moi non plus je ne sais pas par où commencer (mais bon, même si elle n'est plus professionnelle, ma conscience me torturerait trop).

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note : avez -vous lu la quatrième de couverture (toujours en passant sur l'image) : elle est évidemment de l'auteur !

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[#rl21] mon maître et mon vainqueur, roman de françois-henri désérable

Gallimard, Collection Blanche, août 2021, 192 p., 6 ill., 18 euros

4è de couv — « Le cahier, c’était la première chose que m’avait montrée le juge, quand tout à l’heure j’étais entré dans son bureau. Sous la couverture souple et transparente, on pouvait lire au feutre noir : MON MAÎTRE ET MON VAINQUEUR. Sur les pages suivantes, il y avait des poèmes. Voilà ce qu’on avait retrouvé sur Vasco : le revolver, un cahier noirci d’une vingtaine de poèmes et, plus tard, après expertise balistique, des résidus de poudre sur ses mains. Voilà ce qu’il en restait, j’ai pensé, de son histoire d’amour. » — François-Henri Désérable est l'auteur de trois livres aux Éditions Gallimard, dont Évariste et Un certain M. Piekielny. Dans ce nouveau roman virevoltant, il laisse percevoi une connaissance sensible des tourments amoureux.“ Elle n'était pas du tout son genre ; il n'avait jamais été le sien. Ils n'avaient rien pour se plaire ; ils se plurent pourtant, s'aimèrent, souffriront de s'être aimés, se désaimèrent, souffriront de s'être désaimés, se retrouvèrent et se quittèrent pour de bon. ”

Ce roman au titre si poétique révèle le plan cul drague le plus original de la littérature française : infaillible pour qui possède le passe BnF pour la Grande Réserve des manuscrits historiques (il faut au minimum le grade de conservateur) et veut séduire une jeune comédienne entichée de Verlaine ! Une table de consultation de bonnes dimensions, des futons de lecture (ou berceaux : coussins à rouler autour des livres anciens pour les protéger) pour le confort des ébats ; je ne fais pas de dessin mais croyez-moi l'auteur s'amuse bien à décrire la scène et nous à la lire !

À défaut de dessin, chacun des hauts faits (et ils sont nombreux) de la geste amoureuse de Vasco (le personnage qui a des problèmes avec la justice) est ponctué d'un bout rimé, haïku, sonnet, ou quatrain, plus ou moins original, plus ou moins explicite, plus ou moins réussi !

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[lu] sœurs de sable, roman de stéphane héaume

Rivages, avril 2021, 240 pages, 18 euros

4è de couv : 1958, une station balnéaire écrasée de chaleur. 2018, un surprenant huis clos au décor raffiné. Rose et Amelia, deux femmes malmenées par la vie et que soixante ans séparent n’ont, on pourrait le croire, rien en commun. Pourtant, un homme, un secret, un cadavre vont relier leurs existences et changer leur destin.  En donnant corps à deux turbulentes héroïnes dans un univers plein de mystère, Stéphane Héaume nous prouve, avec malice et fantaisie, qu’il faut toujours se méfier de l’eau qui dort. —  Stéphane Héaume est l’auteur de plusieurs romans dont «Le Clos Lothar» (Zulma, 2002, prix du jury Jean-Giono et prix Emmanuel-Roblès) et «Sheridan Square» (Seuil, 2012, prix de la Ville de Deauville).Avant de lire Sœurs de sable, j'avais lorgné plus ou moins sournoisement sur des avis de lecture qui saluaient l'ambiance légère, voire pétillante, estivale, du dernier roman de Stéphane Héaume.
Loin de moi l'idée de stigmatiser les lecteurs optimistes, mais cela m'étonnait un peu (euphémisme) de l'auteur de Dernière Valse à Venise, et de L'Idole Noire, et redoublait mon envie d'y aller voir moi-même.
Si vous pensez que ma lecture à venir était d'ores et déjà biaisée, tenez-en compte en lisant ce qui suit, ou pas.

Heureusement (pour moi en tout cas) le chapitre incipit concentre mystère, noirceur, et romantisme baroque, comme l'illustrent ces quelques lignes :
“ Une heure qu'il ramait, lui, constant, le geste régulier, sûr de la direction. [...] La nuit posait sur son visage un masque de Charon. [...]
La barque se faufila dans l'enchevêtrement des blocs qui formaient des portiques magnifiques, les tympans déchaussés de temples engloutis. Il y avait là une ouverture qui conduisait à l'intérieur. ”

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