[carnet] mes jaseries de février
jeudi 28 février 2019
jaserie : subst. fém. [ʒɑzʀi], [-a-] ; synon. de babillage. La jaserie avant le langage est la fleur Qui précède le fruit (Hugo, Légende, t. 4, 1877, p. 857)
Orpheline : il faudrait un autre mot pour signifier la perte du dernier survivant de ses parents lorsqu'on est soi-même bien avancée en âge.
L'écrivain et psychanalyste belge Lydia Flem écrit1 :
“ A tout âge, on se découvre orphelin de père et de mère. Passée l'enfance, cette double perte ne nous est pas moins épargnée. Si elle ne s'est déjà produite, elle se tient devant nous. Nous la savions inévitable mais, comme notre propre mort, elle paraissait lointaine et, en réalité inimaginable. Longtemps occultée de notre conscience par le flot de la vie, le refus de savoir, le désir de les croire immortels, pour toujours à nos côtés, la mort de nos parents, même annoncée par la maladie ou la sénilité, surgit toujours à l'improviste, nous laisse cois. ”
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1. in: Comment j'ai vidé la maison de mes parents (Seuil 2004, Points 2013)
Depuis plusieurs jours, je fouine à la recherche d'images oubliées (comme celle ci-dessus) qui feraient peu à peu disparaître les flashs de la nuit qui ne me ramènent que le pauvre souvenir du dernier visage de mon père, à l’hôpital. Si vous saviez comme il était beau, à 30, 60, 90 ans ! Il y a d'autres photos de lui dans un recueil de souvenirs (Remembrances) qu'il a écrit au début des années 2000 ; ma sœur l'a mis en forme et je l'ai publié sur ce blogue en 2007, ça commence ici :
Charles le bellevillois,lien une petite enfance parisienne (premier épisode des Remembrances ; pour les suivants, il suffit de cliquer sur le lien en fin d'article, enjoy!)
>> petites coupures (de l'anglais short cuts)
♦ Paris Face Cachée, 3 février
Depuis plusieurs années, j'essaie de profiter de cette excellente animation muséale annuelle : sur un week-end, faire découvrir des endroits "culturels" parisiens (aussi en proche banlieue) insolites, étranges ou rarement visités. L'an dernier j'avais choisi la Bibliothèque du Muséum d'histoire naturelle (Jardin des Plantes) et la présentation commentée de collections de modèles de plantes en cire, de planches originales de Redouté, et de catalogues du Jardin Royal.
Cette année, le but de ma visite était en principe tenu "secret" jusqu'au lieu de rendez-vous... une sculptrice des années 30, une maison atelier conçue par Auguste Perret dans le 14è arrondissement. En faisant un peu d'accroliens sur google/wikipedia, il était aisé de deviner que nous allions découvrir le lieu de vie et de travail de Chana Orloff, 7 bis Villa Seurat. Mais à part ça, pour être honnête, non je n'avais jamais entendu parler de cette femme hors du commun, ni jamais découvert la sublime Villa Seurat où vécurent Henry Miller et Anaïs Nin, les frères Lurçat, entre autres !
Lieu et œuvre parfaitement accordés. Conférencière idéale. À la fin, Ariane Justman Tamir, petite-fille de Chana, est venue répondre aux questions des visiteurs.
Mon conseil : l'atelier-maison-expo est ouvert aux visites sur rendez-vous le week-end, n'attendez pas les journées du Patrimoine.
www.chana-orloff.com
♦ Jeanne by Jeanne (rubrique artistique, suite ; l'instant mamilly-gaga)
Un jour de grève de cantine, Jeanne (4 ans et demi) est à la maison. Pendant que je mets la table, elle gribouille dans son coin.
Résultat.
— c'est moi avec des nattes (son ambition... mais il manque encore une bonne vingtaine de centimètres)
Ça me frappe aujourd'hui en écrivant ces mots : cette Jeanne au long cou, aux longs cheveux...
Dans l'atelier de Chana Orloff, il y a une autre Jeanne : Vierge - Jeanne Hébuterne, 1914, plâtre patiné
" Elle était comme moi élève à l’École des Arts Décoratifs. Nous l'appelions Noix de Coco... Mince comme une statue-colonne, deux nattes touchant terre, les yeux bleus en amande, toujours silencieuse, telle je la présentais à mes amis de Montparnasse. Pour beaucoup ce fut le coup de foudre, mais elle ne vit que Modigliani. Chana Orloff “
>> recyclage
Cette rubrique va s'éteindre d'elle-même. J'ai rendu ma plume de rédactrice des pages actualités dans la revue mensuelle Notes Bibliographiques. Trop de stress et de presse au moment du bouclage...
Un dernier copié-collé pour le souvenir ; j'avais aimé rapporter cette brève de l'automne dernier :
Le casse littéraire ne paie pas
Guéret dans la Creuse, un dimanche d'automne, vers deux heures du matin. Un sexagénaire s'introduit dans une librairie et embarque 113 volumes de la Pléiade dans des sacs poubelle. Manque de chance ou de préparation, un voisin a tout vu et la boutique est située en face du commissariat ! Jugé en comparution immédiate, le voleur (récidiviste) a été condamné à 18 mois de prison ferme pour un préjudice estimé à 7000 euros. Le cambrioleur n'a pas réussi à attendrir le juge en expliquant qu'il voulait offrir les livres à sa nouvelle compagne, professeur de lettres.
>> adenga (agenda à rebours : ce qui est fait n'est plus à faire, ne pourra plus être fait)
♦ Le Faiseur de théâtre, Thomas Bernhard, théâtre Dejazet, 14 février
André Marcon, grand acteur. Un monologue ; les autres rôles sont presque muets (mais indispensables) contrastant avec la faconde hystérique du rôle-titre.
J'étais un peu agacée par les commentaires sortie de salle, ce soir là : c'est un texte difficile sur le théâtre, soit ; on est sonnés par l'amertume et le cynisme de l'auteur, mais pas étonnés ni trompés sur la marchandise ! Belle mise en scène dans un décor en miroir reproduisant sur la scène celui de la jolie salle du Dejazet, un peu décatie, poussiéreuse. Ce soir-là, la salle était très peu remplie, ce qui s'accordait plutôt bien avec le thème de la pièce, le texte désabusé et la rage ironique jouée par le comédien. Mais quel dommage !
♦ Léonard Tsuguharu Foujita (1886-1968), Maison de la culture du Japon, 27 février
Exposition-express (taille et durée : elle se termine le 16 mars) à la Maison de la Culture du Japon. Elle complète bien celle du musée Maillol, l'an dernier. Natures mortes (genre bric-à-brac) et paysages parisiens. Peintures de voyage en Amérique du Sud. Beaux nus. Et les deux grands panneaux "de guerre" (Japon, 1940) : antithèses sombres et apocalyptiques au pinceau fantaisiste et léger du dandy montparno ami des chats.
>> le blog en or (chaque mois un blogue que j'aime, admire, envie, copie parfois)
Le mois prochain, peut-être.
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- juste après : mars 2019 (publication envisagée début avril)