[lu] dernière valse à venise, roman de stéphane héaume
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[mémoire] dorothée blanck, muse fascinante et éternelle inspiratrice

billet inspiré par la lecture de Dernière valse à Venise, roman de Stéphane Héaume

Dorothée Blanck (de dos) dans Cléo de 5 à 7 d'Agnès Varda, 1962En m'envoyant par coursier ce roman à paraître chez lui au mois d'octobre, l'éditeur Serge Safran savait-il ce que cette belle lecture ranimerait, attiserait, raviverait en moi ?
Il aurait fallu pour cela qu'il sache que j'avais rencontré Dorothée Blanck (1934-2016) dans les dernières années de sa vie, comme l'auteur du livre qu'il publie ; qu'il lise les quelques notes de blog que je lui ai consacrées. ici
Savait-il que, comme Stéphane Héaume qui lui a dédié son roman, j'avais été fascinée par cette femme âgée à la beauté à peine altérée, toujours stupéfiante.

Dernière valse à Venise, n'est pas une biographie, c'est beaucoup mieux que ça pour la mémoire de celle qui disait (et écrivait) n'avoir été toute sa vie qu'un modèle (comme le personnage qu'elle joue dans Cléo de 5 à 7 d'Agnès Varda), qu'une muse (comme pour Jacques Sternberg, Sophie, la mer et la nuit).

Stéphane Héaume l'a croisée à Trouville où elle avait un tout petit chez elle, et où elle a eu jusqu'à la fin le bonheur de tourner dans les Kinos du Festival Off-courts, chaque année en septembre. Il ne lui a pas parlé — il le raconte — juste entendu sa voix si étrange elle aussi ; cela lui a suffit pour trouver sur-le-champ l'inspiration et en faire le personnage d'une histoire baroque et sombre.

Dans une longue "Note de l'auteur", personnelle et touchante, Stéphane Héaume raconte comment il a rencontré Dorothée.

“ J'étais à la terrasse d'un café, à Trouville, en fin d'après-midi, je venais d'achever un roman et regardais les passants du printemps, me demandant, comme tout le monde, quelle vie pouvait bien se cacher derrière chaque visage.
Et puis ils ont surgi, tous les deux, dans la ruelle, lui la quarantaine, très beau mais très saoul, et elle à côté de lui dans son imperméable crème et ses cheveux blancs, avec une démarche si légère qu'elle semblait flotter au-dessus du pavé. Ils se sont arrêtés devant moi. Et j'ai assisté à la scène qui ouvre ce récit — à peu près la même. ”

Stéphane recroisera Dorothée à Trouville, mais sans jamais oser l'aborder ; il a commencé à écrire l'histoire inspirée par la scène du café, transposée place Saint-Marc à la terrasse du café Florian ; lorsqu'une amie lui propose de lui présenter Dorothée qu'elle connaît, il refuse : il préfère attendre, terminer le récit d'abord ; mais il n'aura pas le temps, il apprend peu après la mort de Dorothée (16 janvier 2016) :

“ Envahi d'une grande tristesse, comme orphelin de mon personnage, soudain j'ai achevé d'écrire l'histoire. Une vague de scrupules me submergeait : j'avais fait de cette comédienne un personnage à l'opposé de ce qu'elle avait sans doute été. Je tiens ici à lui rendre hommage en rétablissant la vérité. ”

Ce matin, j'ai retrouvé sur le net quelques "admirateurs" de Dorothée, quelques uns que je connaissais déjà, d'autres non.
Je leur ai envoyé un message annonçant la sortie du livre de Stéphane Héaume.
J'espère qu'il liront Dernière valse à Venise avec la même surprise enchantée que moi, avec la même émotion un peu triste au souvenir de cette femme unique.

Finalement, je préfère croire que cet envoi en service de presse n'était pas ciblé, que  c'est seulement une coïncidence étonnante, heureuse, très belle, comme les aimait Dorothée, comme je les aime.
Merci Serge Safran.
Merci Stéphane Héaume.
Merci pour Dorothée Blanck.
Merci pour ceux qui ont parlé d'elle, en parlent, et en parleront encore.

 

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