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[lu] en territoire ennemi, recueil de textes de didier goux

aux éditions Les Belles Lettres, février 2014, 432 pages, 23 euros 50

en quatrième de couverture : Didier Goux est écrivain et journaliste. Il a 58 ans, ce qui ne laisse pas de l’étonner. Mais c’est sans doute cet âge pré-canonique qui lui a permis de voir s’effacer le pays où il est né, la France, pour se transformer en une contrée hostile, inhabitable, sotte et ravie d’elle-même.  Retracer la carte du premier et dynamiter les redoutes de la seconde constituent la double ambition de ce livre, où le rire cruel tient la dragée haute à la mélancolie.Que je sache, Didier Goux n’a pas de moto, mais il a un motto qu’il fait apparaître en bandeau sur son blogue,lien lequel blog je lis depuis... longtemps :
“ La vanité française consiste à se reprocher toutes les fautes, sauf la faute décisive : la paresse de penser. ”
Didier Goux revendique quelques défauts mais il n’est pas paresseux.

Didier Goux se définit comme “écrivain en bâtiment”. Au début je ne savais pas ce qu’il voulait dire ; c’est en lisant son Journal de blog lien(chaque mois depuis le début de sa publication) que j’ai fini par comprendre. C’est d’ailleurs comme ça que j’ai lu mon premier (et sans doute dernier) Brigade Mondaine. Je n’ai pas regretté : c’était celui dont il avait décalqué l’intrigue sur celle d’un roman de Renaud Camus, que j’ai lu (c’était Loin, je crois) aussi dans la foulée ! Du beau travail d’artisan. Bon, les BM c’est fini et leur auteur n’a pas l’air de trop le regretter. Reste le rewriting alimentaire pour une presse très grand public. Et l’écriture quotidienne d’articles de blog et d’entrées dans son journal (plus intime). Ça en fait des signes, des mots, des lignes. Sans oublier, la lecture ; plus exactement : les lectures. Impressionnant. Ça c’était pour le quantitatif, facile. Pour le qualitatif, je pourrais dire, genre bas bleu :  vous me connaissez, si je lis ce qu’écrit Didier Goux depuis si longtemps, c’est parce que c’est écrit à la perfection. Ou genre groupie de base : une plume impeccable, érudite, ironique, inventive, évocatrice (mais il faudrait expliquer de quoi). Le mieux c’est d’aller voir vous-mêmes... ou pour les plus paresseux, de consulter les avis que j’ai mis en liens à la fin de cet article.


En territoire ennemi est un recueil de chroniques courtes (pas loin de deux cents) sélectionnées parmi les articles du blog Didier Goux habite ici lien. Quand on ouvre ce vraiment beau livre d’un magnifique rouge tomettes-neuves, rien, pas de préface ni de mot de l’éditeur, ne rappelle la progression chronologique propre au blog (aucun article n’est daté, si ce n’est parfois, faiblement, par son contenu). C’est sûrement étudié pour ! Les textes, titrés, sont présentés dans un ordre différent exprès : regroupés plus ou moins, déplacés pour marquer les rapprochements, ou au contraire créer des glissements d’un thème à l’autre. Je râlerais bien contre l’absence d’index, mais je devine la malice matoise  de l’auteur dans ce plan faussement simple en forme de patience (jeu de). J’ai eu la tentation de me lancer dans la fabrication d’un répertoire des écrivains et œuvres cités, mais voilà, je suis vraiment paresseuse.

J’avoue, j’ai peiné à la lecture de certains développements, mais comme Didier Goux l’écrit à propos de ses propres lectures : une lecture “imbitable” peut être “extrêmement excitante”. Le problème c’est qu’il est ensuite difficile, voire impossible d’en parler à des tiers... Le pauvre lecteur se console, dit-il, en se convainquant que ses efforts auront fait naître en lui des sensations inédites, l’auront ouvert, préparé, à recevoir des connaissances nouvelles. Tout à fait moi.

Heureusement, je me suis sentie beaucoup plus à l’aise avec les nombreuses notes de lecture, les analyses littéraires, les critiques cinématographiques (style ciné-club), et musicales (style La Chance aux Chansons). Dans un autre genre, j’aime beaucoup les sotties, notamment celles sur l’évolution de la langue, la dérive du sens des mots. Un peu moins celles qui donnent à voir la décadence de notre société, de notre culture, sans doute parce qu’elles sont efficaces et font mal... “comme [quand] on montre un écorché aux amoureux de l’homme”.

Un autre motto pour finir (le mien pour ces jours-ci), réplique extraite du beau film turc Winter Sleep :
“ puisqu'il y a des choses qu'on ne peut pas changer, il faut être un peu souple ”

 

>> ils en parlent :

  • [ à compléter ]

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