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[hommage] siné : moustaki et... lester young

En dehors de toute éthique bloguesque, je me contente de recopier le texte de Siné pour Siné Mensuel lienque Stéphane Mercurio a diffusé ce matin sur facebook, qui a déjà été repris sur les blogs, et le sera encore car il est for-mi-dable. Le voici :

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“ J’aimais beaucoup Moustaki. C’était un super brave mec, incroyablement gentil. Pas l’ombre d’une quelconque méchanceté. C’en était presque énervant ! Une voix douce, un regard tendre, un sourire permanent comme la révolution qu’il appelait de ses vœux.
Mais sa nonchalance ne l’empêchait pas d’avoir des convictions bien arrêtées. Bien que d’origine juive, il était foncièrement contre la politique d’Israël, ce qui n’est pas très courant, mais on était en phase sur beaucoup d’autres sujets. ”

Il m’avait écrit, un jour, quand je travaillais encore à Charlie-Hebdo, pour me demander si j’avais une combine pour qu’il puisse se procurer le film de Gjon Mili, Jammin’ the Blues, dont j’avais dit beaucoup de bien dans une de mes zones et qu’il cherchait désespérément depuis des années.
Il me disait être prêt à payer une fortune pour revoir ce pur chef-d’œuvre. Je décidai d’aller lui faire dupliquer à la FNAC et de lui porter dans son duplex, au cinquième étage de la rue Saint-Louis-en-l’Île.
Je savais qu’il luttait contre un emphysème et qu’il était coincé chez lui, sans pouvoir en sortir.
Je n’étais pas en très bon état non plus, mais quand même plus vaillant que lui, et devais me trimbaler avec une bouteille d’oxygène dans un sac à dos et des tuyaux dans le tarin à cause d’une insuffisance respiratoire due à mes trois paquets de clopes quotidiens.
J’avais déjà beaucoup de difficultés à marcher avec mes prothèses de hanches et les escaliers n’étaient pas recommandés pour mon cœur fatigué et mes bronches en compote.
Néanmoins, je réussis à grimper les cinq étages en m’asseyant à chaque palier pour retrouver ma respiration, et j’arrivai enfin devant sa porte apparemment frais comme un gardon après avoir patienté cinq bonnes minutes avant de sonner.
Quand il vint m’ouvrir, on s’embrassa en nous emmêlant les tuyaux, car lui aussi en était affublé !
Il m’envia ma forme presque olympique et je me gardai bien de lui révéler ma supercherie !
C’est bizarre où va se nicher la coquetterie !
Fou de joie et fébrile d’impatience, il tint à regarder le film immédiatement, et comme il ne dure que dix minutes, on se le farcit même deux fois !
C’est un très joli souvenir !
J’ai regretté de n’avoir pu l’accompagner au cimetière, mais maintenant je ne peux même plus faire semblant de marcher. Je suis fait comme un rat !

Jammin'The Blues, est un petit joyau en noir et blanc de Gjon Mili, photographe albanais exilé aux USA en 1923. Ce film est sorti en 1944. J’ai eu la chance de le voir, pour la première fois, vers 195O au Hot-club, et j’ai du le revoir une bonne centaine de fois depuis ! Dès les premières images sur le chapeau de Lester Young qui joue comme un dieu sur son ténor avec une cigarette coincée entre deux doigts, on est cloué au fauteuil subjugué par tant de beauté et ça n’arrête pas jusqu’à la fin. Les musiciens, Illinois Jacquet, Harry Edison, Red Callender, Big Sid Catlett, Jo Jones, Barney Kessel, la chanteuse Mary Bryant dans un époustouflant On the Sunny Side of the Street , et les danseurs sont tous au mieux de leur forme et les images sont à se taper le cul par terre !
Je crois que je vais m’en refiler une giclée accompagnée d’un petit Old Fashioned  ! De vous en parler, ça m’a mis l’eau à la bouche !
À plus !

 

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