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6 notes en avril 2013

[littérature] catherine guérard quelque part

CES-PRINCES-CATHERINE-GUERARD

 

RENATAUn fil littéraire qui relie François Nourissier à Alain Bonnand m'a conduite aux deux très étonnants romans de Catherine Guérard : Ces Princes (1955, La Table Ronde) et Renata n'importe quoi (1967, Gallimard).

Je n'ai trouvé aucune information biographique sur l'auteur, aucune photo, pas de page wikipedia. Juste sa voix et son rire que l'on entend, grâce à l'Ina, sur un enregistrement du Masque et la plume de décembre 67 (avec François-Régis Bastide, Michel Polac, Robert Kanters, Matthieu Galley, Alain Bosquet). Et appris qu'elle était journaliste. Rien d'autre. Cette année-là, on avait parlé de Renata pour le Goncourt. Un an plus tard, Gallimard réédite Ces Princes. Après, rien. On peut craindre le pire d'une disparition médiatique aussi totale.

(lire la transcription partielle de l'émission Le Masque et la Plume du 10 décembre 1967 dans la suite au billet Renata n'importe quoi)

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[lu] renata n'importe quoi, roman de catherine guérard

éditions Gallimard, 1967, 204 pages

Brassaï : Clocharde, quai des Tuileries, vers 1930-1932 — (C) Estate Brassaï - RMN-Grand Palais — Crédit photographique : (C) Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN-Grand Palais / Adam
Clocharde, quai des Tuileries, Brassaï (c) Estate Brassaï - RMN

C'est un monologue intérieur, ininterrompu, qui couvre environ soixante heures : celui d'une femme simple qui en a assez et qui part. On entend d'abord sa jubilation et sa fierté de planter là sa patronne, la concierge de l'immeuble, les commerçants de sa rue qui ne comprennent pas ce qui lui prend tout  à coup. Puis, ses étonnements comiques (un self, le métro, un hôtel minable), ses bonheurs touchants (un banc, une rose, une pomme). Plus tard, sa rage et sa révolte, quand des personnes qu'on dit bien intentionnées tentent de mettre un terme à son envol, en la réinsérant malgré elle.

Catherine Guérard joue avec une ponctuation réduite au strict minimum (la virgule) pour rendre à l'écrit le flot des pensées de son héroïne. La virgule pour la respiration. Après tout quand on se parle à soi-même on ne met pas les points au bout des phrases, ni deux points, ni point virgule. Après une courte adaptation (relire les trois premières pages, par exemple) on pige vite le truc, le rythme.

Quel dommage que ce beau texte trop peu connu n'ait pas été adapté pour le théâtre. En le  lisant, je pensais à (j'entendais) Yolande Moreau ou Corinne Masiero.

Dans la suite à ce billet, lire un extrait de la chronique littéraire de François Nourissier, et la transcription d'une partie de l'émission Le Masque et la Plume du 10 décembre 1967 dans laquelle on entend la voix et le rire de Catherine Guérard.

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[lu] ces princes, roman de catherine guérard

éditions La Table Ronde, 1955, 142 pages

Ces Princes, La Table Ronde
édition de 1955

Lors de la réédition de 1968, Gallimard orne la jaquette du livre d’un bandeau accrocheur, genre clin d’œil : La passion selon Saint-Cyr !
 Je ne sais pas trop quoi en penser... D’un côté c’est idiot puisque c’est surtout de l’école Polytechnique dont il question au tout début du roman. Mais il y a aussi un Général, et une guerre, alors... Et il s’agit bien d’une passion, mortelle.

Ces Princes est une courte histoire d’amour entre deux hommes. C’est un premier roman. C’est étrange d’imaginer une jeune fille (ou une jeune femme, on sait peu de choses sur Catherine Guérard) écrire ce conte profond, romantique et tragique. Pourquoi le choix de ce sujet casse-gueule, voire provocateur pour l'époque ? D’où l'auteur a-t-elle tiré son inspiration et ses modèles ?

Antoine Villaert est un jeune homme bien élevé, un peu fantasque, orgueilleux et timide à la fois. Il a abandonné ses études à Polytechnique pour absence de motivation, a fait son service militaire pour échapper à sa famille, et pris un job dans l’édition qui lui laisse le temps de rêver en attendant de trouver le bonheur. Quant au Général (sans prénom, sans patronyme), il a entre quarante et cinquante ans, beaucoup de culture et d’expérience, de charme et d’élégance. L’histoire de leur rencontre, de leurs amours, heureuse d’abord, progresse régulièrement et inexorablement vers un dénouement tragique. L’écriture est parfaite, maîtrisée, avec des éclats d’ironie tendre. Catherine Guérard réussit à créer sans ostentation et très progressivement, une atmosphère onirique et théâtrale, très étonnante.

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[interlude breton] la chasse aux enfants, le film qui ne se fit pas

Emile Savitry lien— un récit photographique de La Fleur de l'âge , le film maudit de Marcel Carné, d'après le scénario de Jacques Prévert, tourné à Belle-Île-en-Mer en 1947

livre chez Gallimard et expo photos à Vannes dans le cadre du Festival Photos de mer
Anouk Aimée, 15 ans et le chat Tulipe, été 1947
En 1934 un fait divers bouleverse Prévert : pour mater la rébellion des jeunes internés de la maison de redressement de Belle-Île, les autorités locales font appel aux habitants et aux touristes. Une prime est distribuée pour chaque fugitif retrouvé... Jacques en fait un poème, La Chasse à l'enfant, et un scénario.

Ce n'est qu'après la guerre que les vieux amis Carné et Prévert pourront concrétiser leur projet de film basé sur cet événement triste et révoltant. Hélas, de mai à juillet 1947, d'incidents en difficultés techniques et financières, le tournage vire à la catastrophe et sera complètement arrêté au bout de trois mois. Cela fait penser à L'Enfer de Clouzot... Sauf que cette fois on a complètement égaré et jamais retrouvé ce que Marcel Carné avait finalement sauvé et monté une dizaine d'années plus tard.

Il ne reste aujourd'hui que les émouvantes photos noir et blanc du tournage. A Vannes une exposition toute simple présente une petite centaine des clichés (sur 600) du photographe Émile Savitry. Attendrissante Anouk Aimée en jeune amoureuse désespérée. Serge Regianni, le mauvais garçon ébloui par la parisienne Arletty, croisiériste de grand charme. Paul Meurice inflexible et rigide en maton maître-chien. Et Belle-Ile-en-Mer, décor et personnage. Figurants, techniciens, metteur en scène, scénariste. A Vannes, j'ai vu les belles images d'un film fantôme, merci Monsieur Savitry.

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[nabe, extrait] frédéric aristidès, dit fred (5 mars 1931 — 2 avril 2013)

“ Un enfant qui n’adore pas Fred n’est pas un enfant. Moi c’était mon idole quand j’avais douze ans : j’en rêvais la nuit...”
Dans son journal intime, premier tome, au 26 mars 1984 (Nabe’s dream,lien page 343) , Marc-Edouard Nabe raconte une rencontre avec Fred et Gébé (Marcel Zanini est là aussi). Double portrait de deux pères de l'écrivain, aujourd'hui disparus :

"Fred fait partie des géants de la bande dessinée et a influencé toute une génération d'auteurs. Dans chacune de ses oeuvres – de Philémon au Petit cirque – l'auteur accomplit un numéro de funambule dans lequel le génie de Fred éblouit. Son langage résolument novateur, son invention permanente, son imagination foisonnante ont ouvert une nouvelle voie à la bande dessinée. " (c)  Dargaud/Rita Scaglia www.dargaud.com

“ Fred et Gébé ! Comme dans un rêve de fumée ! Nous tombons dans les bras ! Fred et Gébé ! Eux-mêmes ne s’étaient pas revus depuis des années et des années ! Retrouvailles à quatre voix ! C’est toute mon enfance que voilà...  Fred et sa moustache, Gébé et son sourire : deux visages de petits pères de bonté. On dirait deux gosses parisiens. Nos cœurs pleins trinquent. Nous nous félicitons qu’aucun de nous quatre n’ait changé. Le toast est porté à Immortalité (pauvre Reiser) ! Fred me parle de son dernier Philémon : Don Quichotte de l’Atlantique (pas de la Manche). Les Mille et Une Nuits, Ovide, Cervantès, Homère : voilà les sources de Fred. Il ne faut pas s’étonner qu’il soit alors le meilleur dessinateur de bande dessinée. Un enfant qui n’adore pas Fred n’est pas un enfant. Moi, c’était mon idole quand j’avais douze ans : j’en rêvais la nuit... ”

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[en vrac] oeufs de poisson du jour

 pièce d'artisan chocolatier scuplptée à la main dans la masse d'un chocolat 100% pur Venezuela. 150€
Diodinus chocolatus (c) La Mère de Famille
Cette année, le calendrier renchérit cruellement sur la crise économique en confondant Pâques avec 1er avril. Dilemme et manque à gagner dramatiques chez les chocolatiers qui ont du choisir entre l’oeuf et le poisson, se rabattre sur la cloche à écailles, ou  — pour les plus inventifs — créer une carpe-lapin en cacao (non illustrée car pas trouvée sur les internets comme on dit).

Les blogueurs que je lis ont plus souvent retenu le thème humoristique de la journée que le religieux. Voici les liens vers des articles qui m’ont réjoui ce matin (il se peut que je fasse des mises à jour avant minuit) :