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5 notes en septembre 2012

[lu] éloge littéraire du piratage informatique

La Théorie de l’information, roman d’Aurélien Bellanger lien 

Editions Gallimard, collection Blanche, août 2012, 496 pages, 22 euros 50

 en quatrième de couverture : La Théorie de l’information est une épopée économique française. De l’invention du Minitel à l’arrivée des terminaux mobiles, de l’apparition d’Internet au Web 2.0, du triomphe de France Télécom au démantèlement de son monopole, on assistera à l’irruption d’acteurs nouveaux, souvent incontrôlables.  La Théorie de l’information est l’histoire de Pascal Ertanger, le plus brillant d’entre eux. Adolescent solitaire épris d’informatique, il verra son existence basculer au contact de certains artefacts technologiques : éditeur de jeux en BASIC, pornographe amateur, pirate récidiviste et investisseur inspiré, il deviendra l’un des hommes les plus riches du monde. La Théorie de l’information raconte aussi comment un article scientifique publié en 1948 a révolutionné l’histoire des télécommunications et fait basculer le monde dans une ère nouvelle, baptisée Âge de l’information. Pascal Ertanger s’en voudra le prophète exclusif. La Théorie de l’information évoque enfin le destin d’une planète devenue un jouet entre les mains d’un milliardaire fou.Au début, je me sentais élue, j’y croyais : c’était écrit pour moi. Ça parlait de mon époque.
Ça parlait d’entreprises, de lieux, d’institutions, de projets, de programmes, d’événements, de faits divers qui avaient constitué un temps mon environnement professionnel dans les années 80 et 90 :
les technologies de l’information,lien les start-ups, la netéconomie. Ça parlait de personnalités que j’avais croisées (pour être honnête : plutôt moins que plus, et plutôt de loin que de près).
J’étais touchée, émue, et reconnaissante envers ce jeune homme né en 1980 de souffler sur la poussière télématique qui avait enseveli le minitel de mes trente ans.

Pour un peu  je croyais savoir ce que j’allais lire au chapitre suivant.
Je regrettais cependant — on ne se refait pas — l’absence d’index à la fin du livre, de bibliographie, de notes à consulter en bas de page, de tableau chronologique.

Et puis au bout d’une centaine de pages, j’ai lâché prise et enfin compris que c’était un roman, un vrai, un bon. Plaisant, intrigant, et dérangeant à la fois. Qui décale, décolle, et fait décoller. Je me suis laissée embarquer  avec plaisir, loin, dans d'autres temps que le mien.

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[rentrée littéraire] brioche, roman de caroline vié

éditions JC Lattès, août 2012, 220 pages, 17 euros

lu pour les Chroniques de la rentrée littéraire Chroniques

en quatrième de couverture : « Il paraît que tu n'es pas très beau. Tout le monde me le dit et c'est sans doute un fait. Je le vois. Je le sais. Tu transpires un peu. Et j'ai rarement vu quelqu'un d'aussi mal fagoté. Quand tu marches, tu te dandines. Tes jambes sont arquées. Ta silhouette est un peu voûtée comme si ta tête était trop grosse, trop lourde pour le reste de ton corps. Tu as largement dix kilos de trop. J'ai bien vu tout ça. Mieux que personne. Mais j'aime chacun de tes défauts. Comme je suis seule à les chérir, tes faiblesses n'appartiennent qu'à moi.  Et puis, un jour, j'ai appris que tu étais marié. C'est là que j'aurais dû poser les armes, mais je ne l'ai pas fait parce qu'on ne change pas les rayures d'un zèbre. » Elle croise à longueur de journée des stars de cinéma, enchaîne les voyages exotiques, est mariée à un homme formidable qui lui a donné un petit garçon modèle. Bien sûr, elle s’ennuie.  Jusqu’au jour où elle le rencontre, au hasard d’une interview. Avant lui, elle ne savait rien de l’amour.  On ne soupçonne jamais les folies qui sommeillent en nous. Caroline Vié est journaliste de cinéma. Elle a longtemps participé à l’émission de Canal +, « Le Cercle », et travaille actuellement au quotidien 20 minutes. Mariée et mère de famille, elle vit en région parisienne. Brioche est son premier roman.Je vais le dire vite pour que ce soit fait et après c’est promis je dirai pourquoi : je n’ai pas aimé le Brioche de Caroline Vié.
Malgré toute l’indulgence que je voulais mettre dans la chronique d’un premier roman. Malgré le respect que j’ai toujours pour le travail d’un (ou une) primo-écrivant. Malgré (ou à cause de) certaine reconnaissance des efforts produits pour (me) plaire.
A tel point que j’ai voulu en avoir le cœur net, lire quelques avis de chroniqueurs amateurs, comme moi — ce qu’habituellement je ne fais jamais avant d’avoir remis ma copie. Juste deux, trois, pour voir. Bizarrement on y parlait de roman à croquer, de petite faim, de folie douce, d’eau à la bouche.
Ça m’a étonnée comme si on n’avait pas lu le même livre (pourtant si) ; mais ça m’a rassurée aussi : même si je suis un peu méchante ici avec Brioche, les internautes trouveront aussi des critiques laudatives et plus positives que la mienne.

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[nabe, extrait] rené giner (19?? - 2012), tombeau pour un jazzman méconnu

... cet ogre sentimental qui pleurnichait en rigolant et ne rigolait jamais sans pleurnicher ... Néné aurait swingué sur une boîte de petits pois ...

Rene Giner, batteur d'orchestre de bal, Montpellier 1966 (google images)— Il est mort Néné ?
— Oui, il y a deux trois mois à peu près, c'est par sa femme que j'ai appris...
— On savait pas. Il avait quel âge, 70, 75 ?
— Ah, mais on pensait même pas qu'il irait jusque là... tout ce qu'il buvait... dans quel état... quand il dormait torse nu en hiver sur des cartons dans la rue... il faisait la manche... c'est comme ça qu'il voulait vivre, Néné...

J'étais là,(1) j'écoutais Marcel Zanini, Pierre Etaix puis Marc-Edouard Nabe, visiblement émus, évoquer plaisamment les frasques talentueuses d'un homme libre qu'ils avaient connu et aimé.
Encore un de leurs jazzmen Célestes comme des Clochards (voir Sam Woodyardlien, François Rilhaclien) .
Et tout à coup, Nabe, s'adresse à moi, impérieux :

— Il faut que vous en parliez... sur votre blog ! (2)


Bien gentil, mais j'avais à peine compris le nom de “Néné”, moi.
René comment ?... Girer ? J'ai pas osé demander.

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[rentrée littéraire] c'est maman qui a tué le père noël, roman d'alexandra varrin

éditions Léo Scheer, 12 septembre 2012, 208 pages, 19 euros

lu pour les Chroniques de la rentrée littéraire Chroniques

la quatrième de couverture : Ils ne pensent pas à mal et au fond ce sont des gens bien, notion que vous avez apprise par cœur même si ce sont des personnes que vous ne connaissez pas, qui ne se sont jamais mouillées pour vous et à qui vous hésiteriez longtemps à donner un rein même en sachant qu’ils en ont besoin. La famille. Finalement c’est un peu comme la religion  : si ça n’existait pas, il y aurait moins de tarés.  »  Huis-clos familial tragi-comique, C’est maman qui a tué le Père Noël réunit pour les fêtes de fin d’année trois femmes issues de générations différentes, la grand-mère, la mère et la fille, chacune en proie à ses névroses, pas nécessairement compatibles avec celles des autres. Les squelettes sortent du placard tandis que tout le monde déballe sa hotte à l’occasion de la Nativité, et, comme le veut la coutume, ça sent le sapin.Alice Deschain, se lève en panique à 7 heures le matin du 24 décembre 2011 et se met au lit le même jour à 21 heures 24 sans ouvrir ses cadeaux de Noël parce qu’elle n’en a... rien... rien à foutre !

Ça c’est pour la première partie de C’est maman qui... : dix chapitres découpent minutieusement le déroulement d'une journée de retrouvailles calamiteuses, alternant équitablement les points de vue d'Alice, la fille, de sa mère Danièle, et de sa grand-mère Berthe. Toutes les trois, chacune dans leur style de dinguerie personnelle, rivalisent de provocation, de mauvaise foi, de méchanceté plus ou moins volontaire, de maladresse névrotique. Tout ça, rythmé et conté avec un humour noir ravageur mais pas dénué d'émotion

Dans la seconde partie, plus courte (4 chapitres)

, Alice joue plus ou moins consciemment le rôle de deus ex machina, et à quelques outrances près rétablit in extremis un semblant de paix provisoire entre belligérantes.

Et puis il y a l’épilogue, mais là je ne peux rien dire. Seulement que c’est une idée forte et formidablement touchante, géniale, quoi ! J’irai pas jusqu’à penser qu’Alexandra Varrin a écrit tout le roman pour cette chute, non, mais chut !

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