[niguedouille] pourquoi je n'irai pas voir l'expo helmut newton
jeudi 05 avril 2012
Parce qu'hier soir, j'ai pu feuilleter à loisir les pages du plus grand, plus gros et plus cher livre de photos au monde... Si lourd et si imposant qu'il est vendu (10 000 euros !) déjà installé sur un support métallique pliant télescopique (genre table de camping hype). Il était là, dans un coin de l'appartement hausmanien d'un galériste et collectionneur d'art moderne et contemporain : de Degas (une danseuse) et Rodin (un baiser) à Koons (un caniche géant et rose bonbon), et Murakami, Wharhol, etc.
Pour me donner une contenance j'avais commencé à tourner les pages du Helmut Newton Sumo's Book,lien et j'ai finalement passé un long moment à admirer les photos kitchissimes (dans le bon sens du terme), reproductions de celles qui sont actuellement exposées au Grand Palais.lien
C'était lors d'une soirée étrange et privée, un rendez-vous en terre inconnue à dix stations de métro de chez moi. C'est peu dire que je ne m'y sentais pas à ma place mais il aurait été ballot de ne pas profiter de ce total dépaysement ! J'avais fait les frais ridicules - je le comprends maintenant - de sortir mes vrais faux-bijoux Chanel vintage ; seulement quand je les avais acheté avec mes premiers sous il y a presque quarante ans, on ne portait pas encore le logo en boucles d'oreille de la taille d'une soucoupe, et les chaînes dorées ne ressemblaient pas à celles des appariteurs dans les grandes administrations (vues sur une invitée).
Ca va paraître idiot mais tout au long de la soirée je pensais aux samedis de Gertrude Stein rue de Fleurus, à Madame Verdurin en son salon. Comment est-il possible que l'art dont il est fait commerce aujourd'hui ait en un siècle basculé dans le grotesque bariolé et infantile ? On est presque dans les mêmes lieux parisiens pourtant. La Dame au Chapeau de Matisse m'aurait-elle autant horrifiée que les grands formats de tel peintre chinois ou indien vus hier et dont j'ai oublié le nom ?
Toujours est-il que chez ces gens-là, on s'amuse, Monsieur, on s'amuse. Ou plutôt on amuse les dames réunies en club et on demande à une jeune chanteuse lyrique de venir illustrer musicalement le thème de la soirée : la vie de Jackie Kennedy Onassis. Quand j'ai rencontré Stefanie Raffaelolien elle mettait au point avec enthousiasme et optimisme un joli programme de récital (Debussy, Poulenc, Vivaldi, Pergolesi, etc.). Elle a eu la gentillesse de m'inviter à venir l'écouter (son commanditaire ne la rétribuant pas, elle avait eu le droit de faire venir deux amies !).
Dans le taxi du retour (non payé !) Stefanie, difficile à réconforter, nous exprimait sa déception, sa rage même d'avoir donné tant de son temps pour un accueil aussi désinvolte et peu respectueux de son travail. Les femmes réunies dans ce grand appartement bourgeois ont continué pendant qu'elle chantait, à papoter, à glousser, à circuler d'une pièce à l'autre, talons Louboutin claquant sur le parquet versaillais, pour aller d'une consultation de numérologie, à une conférence chamanique, à un essayage de lingerie coquine, etc. (ne demandez pas quel rapport avec Jackie O !).
Stefanie a chanté pour peu de monde, c'est vrai, mais c'était un bonheur d'être là pour l'entendre. Et le récital composé lui servira pour une prochaine restitution dans un cadre vraiment professionnel et musical cette fois. Je vous tiendrai au courant !