[interlude] pendant les travaux, le cirque continue
[magnifique] une belle tête d'affiche

[débat] pourquoi tant de e-haine ?

Frédéric Beigbeder prend la tête de la croisade contre le livre numérique

Hyene, enluminure, bestiaire d'Aberdeen (via google)C'est son dada de la rentrée littéraire, et il l'enfourche chaque fois qu'il en a l'occasion sur tous les médias où il est invité, c'est à dire très souvent. C'est bien ça le souci. Beau parleur, chaque fois, il rallie à sa cause les péquins béats autour de lui, comme l'autre soir : Guy Carlier, François de Closets, Natacha Polony et Audrey Pulvar qui opinaient du chef et brûlaient de s'engager sous sa bannière anti dématérialisation du livre en l'écoutant chez Ruquier. Tous admiratifs devant le Chevalier des Lettres en Papier qui annonce la fin de l'humanité lectrice et appelle à la révolte par voie de manifs et sittings dans la préface de son dernier opus.

Pas difficile d'imaginer que tous ceux, nombreux, qui n'ont jamais essayé de lire un livre numérique seront par avance dégoûtés de le faire en entendant ou en lisant Beigdeder. Par vertu du bouche à oreille, ses imprécations vont se répandre très facilement dans le grand public peu enclin à vérifier par lui-même. Heureusement, il existe l'andidote au poison, et c'est :
Après le livre, essai de François Bon

Là où il m'a vraiment scotchée c'est quand Beigbeder a sorti :
c'est pas cher les bouquins !
Evidemment, lui il a tous ceux qu'il veut par service presse. On m'objectera qu'il parlait peut-être des éditions de poche. Soit. Quoique pour un gros lecteur le budget Poches peut vite grimper dans les hauteurs. Ou les bibliothèques de prêt. Soit encore, mais surtout pour les classiques. Chez Ruquier, Beigbeder enchaînait avec un réquisitoire assez rebattu contre la gratuité et le piratage. Evidemment qu'on est d'accord. La gratuité ne va pas bien avec la qualité des contenus, et bien sûr que les artistes doivent être rémunérés. Qui sera contre ça ?

Extraits de l'essai de François Bon :

“ Rien à prouver, rien à démontrer, juste comprendre. Longtemps qu’on a appris que militer pour les promesses du futur mène plutôt à la catastrophe. ”

“ Quel risque pour la pensée et l’écriture ?
[...]
Je n’ai pas de conclusion : sinon s’interdire de juger, être vigilant sur nos propres usages, l’école de la concentration, et curieux de ce qui s’amorce sur les écrans des autres. Savoir, lorsque changent nos usages de lecture, changent aussi nos modes de pensée, que la distraction est plus présente, plus tentante, et qu’il ne s’agit pas pourtant forcément de marche arrière. ”

“ L’inventaire alors, ici, dans ces directions juxtaposées, croisées, est d’abord personnel : on a remplacé le livre, cela change quoi, quels risques, quelles opportunités, quelle prescription pour le présent même – et vivre cette mutation, reçue dans notre propre temps biographique, comme insigne chance, à quel prix ?
Et si paradoxalement, alors qu’on parle de télévision numérique, de diffusion numérique de la musique, la transposition du livre au numérique n’était elle aussi qu’un épiphénomène de la période de transition, le temps que naissent, depuis l’intérieur de nos nouveaux usages de lecture, les propres formes denses que ces usages sont susceptibles d’engendrer, et ne se révéleront à notre imaginaire qu’à mesure que nous les expérimenterons ? ”

 

 

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