[niguedouille] raymond aron plutôt que françois mauriac
mercredi 05 janvier 2011
J'ai pris le 89 à deux pas de chez moi ce matin. Jusqu'au bout de la ligne vers l'est. Presque une excursion touristique par un joli soleil d'hiver.
Montparnasse, Rennes, Vaugirard : rien de remarquable avant la grille du Jardin du Luxembourg.
La voix féminine du bus égrène ensuite des arrêts tentateurs : Musée du Sénat, Panthéon, Lycée Henri IV, Institut du Monde Arabe, Jardin des Plantes. Je ne me laisse pas détourner du but que je me suis fixé de longue date.
Dans la dernière partie du voyage le bus longe la rive gauche de la Seine. Ce sont des quartiers neufs que je ne connais pas encore bien. On passe au ras des façades d'immeubles de bureaux modernes. Si près, qu'on louche à vouloir les visiter des yeux. Trop vite, pour pouvoir s'attarder sur les piles de dossiers qui croulent, et les écheveaux de cables qui palétuvent derrière écrans et imprimantes. Souvent en rez-de-chaussée, il y a des cafétérias ou des restaurants d'entreprise encore vides. Sur les tables bien alignées, les carafes d'eau sont déjà disposées. Reste l'impression d'un travelling de cinéma au milieu d'un décor en fabrication, avant l'arrivée des figurants du film.
Le bus tourne brusquement à droite, je pense être arrivée.
La prochaine fois je descendrai à Raymond Aron, plutôt qu'à François Mauriac.
Ouais, je ne savais pas. C'était la première fois que j'allais à la BFM pour autre chose qu'une expo ou un séminaire.
J'ai lu Entrée Ouest, Salles Etude, et j'ai cru que c'était ça, mais non. En fait j'aurais dû entrer par l'est.
D'ailleurs quand je me suis présentée à un comptoir d'accueil pour obtenir une carte d'accès :
- c'est pour les salles étude ou recherche ?
- heuh... étude, je crois... ?
- vous devez le savoir : l'étude c'est libre, mais la recherche, non !
Avec un petit supplément d'explication j'ai finalement compris et me suis excusée pour ma confusion de béotienne. C'était bien un accès aux salles recherche dont j'avais besoin. Un comble quand on a (presque) milité pour le logiciel libre que devoir faire de la recherche contrainte !
Ce que je ne savais pas encore (mais qui est bien compréhensible), c'est que pour obtenir l'autorisation de travailler en bibliothèque recherche (rappelez-vous : étude, c'est libre !), il fallait l'accréditation d'un agent bibliothécaire sur... en quelque sorte... ma candidature ! Moi qui n'ai jamais aimé les entretiens d'évaluation, je n'avais pas vu venir celui-là ! Qui s'est finalement pas mal passé du tout... comme quoi.
Au début c'était facile :
- votre recherche porte sur quoi ?
Mon bibliothécaire n'avait jamais entendu parlé de SB, mais j'ai senti sa curiosité quand je lui ai décrit Madame Documentation en quelques traits. J'ai pas osé dire quel avait été son rôle à la BnF (pas des moindres, pourtant).
J'ai quand même eu un peu peur quand j'ai compris tout à coup à ses questions que mon statut amateur ne jouait pas du tout en ma faveur, bien au contraire :
- vous avez déjà écrit, publié ?
- non pas vraiment, juste quelques articles dans des revues techniques, il y a longtemps... et puis j'ai un blog, depuis six ans...
- mais vous avez un contact avec un éditeur, un contrat, une lettre d'intention, pour votre dossier ?
- ben, non... mais j'ai décidé de m'inscrire sur la plateforme d'édition communautaire de Léo Scheer... (je reconnais avoir sorti ça un peu en désespoir de cause)
- vous avez rencontré Léo Scheer ?
- heuh... sur internet ! (c'est vrai puisqu'il répond à mes commentaires sur son blog)
Il était gentil mon examinateur, mais je sentais bien qu'il doutait un peu du sérieux du projet de la petite dame en face de lui.
Pour aggraver mon cas, quand il m'a proposé un mois d'accès je lui ai dit que ça ne suffirait pas !
Comment lui expliquer que c'est une expérience, un défi personnel que je me lance, l'envie de me mesurer à quelque chose d'un petit peu difficile et nouveau. Toujours... cette curiosité !
Finalement il a pris sa décision puisqu'il m'a demandé de me tourner vers l'objectif d'une petite camera accrochée au mur. Clic clac photo.
Délestée de soixante euros, je suis ressortie avec ma précieuse carte rouge valable pour un an.
Il me reste à faire comme Gilda (que je remercie pour m'avoir montré le chemin !) : un planning des demi-journées où je vais aller travailler à la BnF (je vise un rythme de 1 à 2 fois par semaine), et les réservations correspondantes par internet pour une place en salle de recherche, et les documents que je veux consulter (catalogue en ligne).