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[niguedouille on twitter] ce matin, aux galfouilles

[jazz, nabe, extrait] james moody, in memoriam

 Ces jours-ci, Le Monde ne paraissant qu'un jour sur deux ou trois ou quatre, j'ai le temps de lire jusqu'aux chroniques nécrologiques.
James Moody saxo ténor dans l'orchestre de Dizzy Gillepsie (notamment) est mort le 9 décembre : le " Porthos discret du ténor "  comme le décrivait Marc-Edouard Nabe dans son journal intime, Nabe's Dream, en 1983. Cela a du faire de la peine à Marcel Zanini. Lisez la suite de ce billet et vous comprendrez pourquoi...

in: L'Ame de Billie Holiday, Marc-Eouard Nabe, p. 190

photo illustrant L'Ame de Billie Holiday, roman de Marc-Edouard Nabe, dédicace au concert du 22 novembre 2008 au Duc des Lombards : pour Tilly bises Marcel Zanini

 

 

" Une nuit étouffante d'août 1955, mon père revenait de l'Apollo avec James Moody. Ils voulaient passer au Basin Street saluer Clifford Brown et Max Roach qui jouaient là. A la pause, Moody présente son pote Turco-Marseillais à l'imminent cadavre de Clifford. On décide de faire une photo. Byzance ne sortait jamais sans son appareil. Devant le club, la pose s'organise, bras dessous, bras dessus... Byzance envoie le petit oiseau sur le groupe de légendes. A ce moment, King Pleasure passe dans la rue. Moody le hèle. Qu'il vienne se joindre à l'immortalisation ! Mon père, pour la seconde fois, va flasher, lorsque Clifford Brown fait tout stopper...
-- Voilà Lady !
Les têtes se torticolisent : en effet comme dans une vapeur aladine apparaît Billie Holiday au bras de son mari Louis McCay. Tous la couvrent de postillons de miel. On ose... Byzance frémit d'irréalité. Elle se prête volontiers au tableau de chasse. Mon père supplie un passant de déclencher la scène. Il se place à droite, la main gauche de Brownie (celle qui soutient la trompette) sur son épaule. King Pleasure prend Billie par la taille et James Moody se glisse entre Clifford et Lady Day. Ca sourit de partout. McCay est sur le bas-côté de la photo, les mains dans les poches, comme un barbeau qui attend sa putain. L'image en boîte, les géants se dispersent. Un instant, juste un instant et ça existe pour toujours.
J'ai le cliché devant moi. Il appartient aux documents qui prouvent l'existence des soucoupes volantes. Dans un halo d'aura, OVNI HOLIDAY est là, à vol de baiser de mon père. En pantalon et mocassins, ceinture dorée et sac de soirée, corsage en soie qui dégage bien ses clavicules : sport et incognito. Elle est menue ici, fine et pâle, douce peau des pieds qui monte vers les hanches. Cheveux courts, beau sous-rire mélancolieux.
Byzance, avant qu'elle continue son chemin, lui a embrassé les mains, un genou bien enfoncé dans le macadam.
Ca passera. "

 

 

... et d'autres billets du blogue de tilly sur Nabe et ses livres...

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