[fan] souvenir que me veux-tu ?
mercredi 05 mai 2010
A chaque concert (un mardi par mois au Petit Journal St Michel) Marcel Zanini et ses musiciens donnent le signal du retour au bercail à la fin du troisième set, en jouant une composition de Marcel au titre saturnien inspiré d'un poème de Verlaine (Nevermore, Melancholia).
- C'est le dernier morceau, annonce-t-il goguenard et sûr de son coup car il suscite chaque fois les exclamations de frustration de son public !
Hier soir, Marcel a brodé une improvisation burlesque-émouvante sur son annonce rituelle de fin de concert :
- Eh attention, le dernier métro...! Il faut que je rentre à l'hospice, moi... sinon ! La soeur Marie-Gabrielle va encore râler quand elle me verra arriver avec mes souliers à la main !
C'est alors que de derrière sa batterie, Michel Denis a lâché comme en aparté grognon :
- Ouais, et va falloir te raccompagner, comme on faisait avec Sam Woodyard à l'hôpital Saint-Antoire !
Jamais je n'aurais compris cette "private joke", si je n'avais pas lu les premiers tomes du Journal intime de Marc-Edouard Nabe. Sans aller vérifier, c'est dans Tohu-Bohu (1985-86) je crois que Nabe raconte les "évasions" de Sam Woodyard soutenu par ses amis jazzmen parisiens, au premier rang desquels Marcel et son fils. Alcoolique, très affaibli, souvent hospitalisé, sans ressources, mais toujours génial musicien, le légendaire Sam Woodyard a continué grâce à eux à jouer presque jusqu'à sa mort à Paris en 1988 à l'âge 62 ans.
Au passage, rien là-dessus sur la page wikipedia très succincte consacrée au batteur du Duke (période Ella) !
Marcel n'y est même pas cité, et pourtant pendant plusieurs années dans les clubs parisiens, Sam c'était son batteur, avant Michel Denis.
En rendant leur vestiaire aux clients qui auraient bien voulu entendre jouer des prolongations, Aurélie les gronde gentiment :
- Il faut qu'on le ménage notre Marcel !
Le premier set commencé vers 21:15 avait duré une heure... Marcel a sonné le départ à 00:30, quelle santé à 86 ans !
Quel bonheur pour lui de jouer et pour nous de l'écouter !
Bravo et merci à l'équipe chaleureuse du Petit Journal (Coco, Francis, Aurélie, et Jean en cuisine qu'on ne voit jamais) pour leur fidélité à Marcel, au swing, au jazz !