[citation] Hervé Resse, un quincadra en révolte
Lèche vitrines, ce weekend

[Charles le bellevillois] Il revint de guerre, ils se marièrent et eurent trois enfants

Episode précédent : La bataille de Berlin, avril-mai 1945
Premier épisode : Charles de Belleville

Note de l'Photo_0004éditrice : Celui-là est mon épisode préféré !

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Dès mon retour, je revis Suzel mon amie d’enfance du Vert-Galant.

La guerre l’avait refoulée à Caen où elle travaillait comme secrétaire aux Chantiers navals de Blainville dont son père dirigeait la comptabilité. À la Libération, elle était revenue à Paris, occuper l’appartement rue Jouffroy. Elle avait pris sa part de risques guerriers lors du débarquement et des bombardements de Caen. Trois cent cinquante, là aussi, mais en deux mois seulement !


« Mariés » déjà, à diverses reprises, lors de nos jeux d’enfants, nous décidâmes en cet hiver 1945-46, de nous fiancer, puis de nous unir pour de bon cette fois, le 24 juin.

Les restrictions encore très, sévères à l’époque, réduisirent à une demi-journée, les festivités : comparution à la mairie du XVIIIe, modePhoto_0006ste réception pour deux douzaines de parents et amis, aux Buttes-Chaumont, avec un petit orchestre pour danser – cadeau de mariage du cousin René Cloérec – Un dîner familial, rue Jouffroy, concluait la journée. La Normandie, mieux pourvue que Paris, avait permis à mes beaux-parents de le composer comme les copieux menus de fête d’avant-guerre.

Le lendemain matin de bonne heure et… de bonheur ! nous partîmes en voyage de noces pour… l’Allemagne !! C’était le second voyage organisé depuis la fin de la guerre par Tourisme et Travail, seule et unique agence de voyage alors. La Forêt-Noire nous accueillit avec ses troupes marocaines d’occupation en cette fin de juin très ensoleillée. J’avais déjà, en octobre 1945, accepté un travail d’interprète accompagnateur pour le tout premier voyage de T&T et apprécié cette belle région. Si belle, que nous y retournâmes l’année suivante, en 1947. Le séjour trop vite achevé au bord du Titisee que nous avions traversé à la nage dans sa longueur – 2 kilomètres – nous regagnions, couverts de coups de soleil, Paris et l’appartement du 16 de la rue Jouffroy. Mes beaux-parents, désormais caennais, nous le laissaient avec leurs meubles, pour débuter.

Quelques années plus tard, nous achetâmes ce logement mis en vente à la mort du propriétaire. Le téléphone y arriva enfin dans les années cinquante. Il n’était pas automatique encore et il fallait tourner une manivelle et appeler « Mademoiselle……….. passez-moi MACMAHON 16 82 SVP ». Nous demeurâmes là seize années, les plus belles de notre jeune famille. Naquirent Tilly en 1949, Claire en 1952 et Jean-Luc en 1957. L’évolution de la puériculture sauta rapidement de l’aînée aux suivants : lit à barreaux, langes, biberons, lait en poudre, couches à laver, couches à échanger, ramasser et enfin à jeter… École maternelle, petites classes, lycée, piano… Tout passa si vite ! Img_0003

Agréablement ouvert sur deux rues, l’appartement n’avait, hélas, que les commodités du XIXe siècle : cuisine étroite et sombre, pas de salle de bain. J’en avais créé une avec douche dans un minuscule réduit. Aux fenêtres qui s’ouvraient face aux quatre ou cinq marches accédant au crasseux passage Cardinet, nous respirions le trafic automobile croissant de la rue Jouffroy. Pour les enfants et nous-mêmes, nous décidâmes d’acquérir un plus grand logis doté du confort moderne.

Toujours bien inspirée, Suzel trouva, en construction à Orsay, dans un magnifique parc à flanc de colline, en bordure des bois, une belle résidence de neuf pavillons. Perché au troisième et dernier étage, avec un grand balcon noyé dans les frondaisons de châtaigniers, l’appartement vaste et moderne répondait à nos souhaits.

La vie familiale allait s’y organiser pour vingt nouvelles années. Bien sûr, les trajets quotidiens allongés – métro, boulot– étaient la contrepartie du bonheur à la campagne. Nous possédions toutefois, depuis une dizaine d’années, une voiture, bientôt deux et, s’il
pleuvait ou gelait fort, Suzel venait m’attendre à la descente du train de la ligne de Saint- Rémy-lès-Chevreuse, qui devint peu à peu le RER B. Cette ligne conduit maintenant directement au Vert-Galant, joignant la banlieue Sud, à la banlieue Nord comme si elle me suivait à la trace !

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